Le Camp de Gurs

Jean-Louis Davant
Jatorrizko bertsioa euskaraz

L'exposition organisée sur l'histoire du Camp de Gurs à la bibliothèque de Mauléon et les témoignages qui l'accompagnent ont le grand mérite de rappeler un chapitre trop oublié de notre histoire. Pour l'approfondir, il faut consulter un livre qui s'y trouve exposé : "Le Camp de Gurs", 1939-1945, un aspect méconnu de l'histoire du Béarn" de Claude LAHARIE.

Ce camp strictement français ne fut heureusement pas un camp de la mort, ni même un lieu de répression, mais par nature il ne pouvait pas être non plus une joyeuse colonie de vacances, c'est le moins que l'on puisse en dire par euphémisme ! Il fut créé au printemps 1939 par le gouvernement DALADIER, sous la IIIème République juste à la fin de la guerre d'Espagne, quelques mois avant le déclenchement de la 2ème guerre mondiale. Il fut gardé par les gendarmes mobiles jusqu'en novembre 1940, puis par des gardiens civils souvent recrutés dans la proche région.

Il n'y a pas de miradors, ni d'armes braquées sur la population. Elle est tout de même confinée derrière les barbelés, privée de ses relations et activités normales, ainsi que de toute perspective raisonnable d'avenir. De plus elle souffrira bientôt du surpeuplement et de la dégradation rapide des installations, avec la promiscuité, la pullulation des rats, l'inconfort, l'ennui et tous les désagréments que peut évoquer le terme même de "camp"…

Argazkia
Le Camp de Gurs.

Il était d'abord prévu pour héberger les gudari basques du front de Catalogne qui s'étaient réfugiés en Roussillon après la percée franquiste de janvier 1939. Il recevra en plus 18 000 autres combattants républicains : "Internationaux", "Aviateurs", "Espagnols", en contingents comparables à ceux des Basques (environ 6000 hommes pour chacun des 4 groupes).

Ensuite viendra sous Vichy le tour des Juifs, notamment de citoyenneté allemande. Près de 4000 de ceux-ci seront livrés aux autorités nazies d'occupation, et la plupart mourront en déportation. A la fin de la guerre, Gurs recevra 310 prisonniers allemands, dont 210 environ capturés par les maquis de Soule, plus 1500 français soupçonnés de collaboration, et autant de "réfugiés espagnols", dont de nombreux maquisards ayant échoué dans leurs assauts contre les forces franquistes massées à la frontière. C'étaient surtout des Aragonais et des Basques.

Les Basques de ce camp

L'on ne s'étonnera pas si je mets l'accent sur le passage d'un gros contingent basque dans le Camp de Gurs, toujours en m'appuyant sur le livre de Claude Laharie. Je vois à la page 78 sur la photocopie d'un document officiel : "Basques… 3484". Ce document est daté du 23 août 1939. Il est signé par "Le chef d'escadron DAVERGNE", Commandant le camp". Dans le livre, le texte est précédé de ce titre sans équivoque : BASQUES, "AVIATEURS", "INTERNATIONAUX" et ESPAGNOLS". Seuls les Basques y sont libres de tous guillemets.

On les retrouve à la page 363 sous cet autre titre : "Annexe I, effectifs internés au camp de Gurs. I Réfugiés venant d'Espagne (du 5 avril 1939 au 31 août 1939) - Basques… 6555".

Entre ces deux documents, à diverses reprises, Claude Laharie parle des Basques notamment sous des photographies qui les montrent en groupes variés, pages 85, 89 et 99.

En mai 1940, ce sont 800 civils basques qui entrent au camp. Il s'agit de militants et de cadres des partis abertzale (PNC, ANV) et du syndicat E.L.A. (pages 140, 141 et 142). Ils seront libérés à partir du 21 juin 1940, dans la panique qui s'étendra lors du désastre des armées franco-britanniques. Beaucoup rejoindront les Amériques grâce à leur aumônier le Père Azpiazu.

Quant aux combattants basques et autres républicains, la plupart seront embauchés pendant cette guerre de 1939-40 par les usines d'armes et d'aviation (à Tarbes, à Toulouse…), dans les forêts des Landes et des Pyrénées, dans les carrières et chantiers, pour remplacer la main d'œuvre française mobilisée par les armées. Beaucoup adhéreront à la résistance à partir du 11 novembre 1942, où les forces allemandes envahirent la zone dite libre, dont faisaient partie le Béarn et la Soule. Ensuite, au printemps 1945, certains de ces maquisards participeront à la libération de la Pointe de Grave, dans le Bataillon Basque commandé par ORDOKI.

Des milliers de Basques ont donc été officiellement répertoriés comme tels au Camp de Gurs par l'administration française. Comment comprendre ce fait inhabituel dans ce pays jacobin ? Il s'explique sans doute par l'existence d'un gouvernement basque dirigé par le Président AGUIRRE. En principe, le Pays Basque Occidental n'était qu'autonome, mais en fait il se conduisit comme une nation souveraine, avec sa propre armée, gudalostea, car il était coupé de Madrid et de Valence (siège provisoire du gouvernement républicain) par les forces franquistes.

Ces Basques combattaient pour la République, certes, mais aussi pour avoir leur propre République, celle d'Euskadi.

Enfin, (mais ceci est une autre histoire), en août 1944, une section de gardiens civils de Gurs, commandée par le lieutenant Boutry, participe à la libération de Mauléon et de Tardets, avec les maquis de Soule. Il faut aussi le reconnaître.

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