Processus psychosociaux de transition, engagement politique et exil : l’exemple de militants basques

Kristina LARRANAGA

En tant qu’étudiante de doctorat de psychologie sociale, j’ai voulu analyser la réalité profonde du militant exilé de l’ETA, et la reconstruire à partir d’entretiens et d’informations confidentielles sur des phases importantes de leurs parcours de vie qui sont assimilables à des transitions psychosociales.

Dans le premier chapitre pour comprendre l’exil basque, il a paru indispensable de signaler les dures conséquences des conflits vécus pour les militants engagés, comme pour le peuple basque en général pendant la longue période de la lutte pour la construction d’une identité nationale basque. Pour cela, nous commençons notre thèse dans le premier chapitre par un résumé d’histoire contemporaine du peuple basque.

La communauté basque date de la préhistoire et poursuit un processus historique différent des autres communautés, ce qui a conditionné pour ma part, l’histoire récente jusqu’à déboucher sur l’actuelle situation socio-politique. Le conflit national basque surgit tout autant par l’implantation du système capitaliste que par la séparation définitive de "Euskal Herria" moyennant une frontière imposée aux basques qui continue encore de signaler aujourd’hui le seuil de l’espace d’exil. Le fait de se remémorer l’histoire contemporaine, nous a permis de relever que la question nationale pendant la période sanglante et répressive du franquisme s’est caractérisée par la résistance basque contre la dictature mais aussi pour l’indépendance du Pays Basque. Ainsi nous comprenons mieux qu’après une période de résistance menée depuis l’exil après la victoire franquiste arrivera l’organisation armée ETA, qui naîtra à l’intérieur du pays dans l’année 1959.

Photo: Anita Patterson
Photo: Anita Patterson (abpphotos@yahoo.com)

A partir de son intervention, la répression induite engendrera plus d’exilés basques et la lutte se radicalisera. Ces nouveaux exilés se situent, dans leur majorité, au Pays Basque Nord bien que certains se déplacent vers d’autres pays européens et en Amérique Latine. Le choc pour l’exilé est fort, à commencer par le changement de la langue dominante, car bien que le basque soit parlé pour une partie de la population, l’intégration totale dans le Nord du Pays Basque, impliquera d’acquérir la connaissance de la langue française. Dans les années soixante, la majorité des réfugiés d’ETA sont en situation régulière au niveau administratif et beaucoup d’entre eux se sont intégrés dans la vie associative et professionnelle du Pays Basque Nord, jusqu’à ce que les conventions entre les états espagnol et français commencent à donner des résultats avec la suppression de la carte de réfugié pour les exilés basques. C’est ainsi que commencent les premières déportations dans les pays d’Amérique Latine et en Afrique et les assignations à résidence dans l’État français. A partir de cette nouvelle réalité la situation de l’exilé change radicalement et beaucoup d’entre eux passent à la clandestinité.

Dans le deuxième chapitre intitulé l’exil comme situation de transition, nous avons proposé des modèles théoriques d’analyse des transitions psychosociales. Nous nous sommes intéressée à des travaux spécifiques, sur les processus d’interculturation en jeu lors de migrations. De même, nous avons repris et décrit des études focalisées sur les familles de réfugiés, sur les conséquences des tortures subies par des personnes demandeuses d’asile, et sur les pathologies de l’exil liées à des ruptures identitaires. Ce détour à la fois théorique et empirique, a conduit à décrire des catégories de situations d’exil, selon des critères juridico-administratifs et des critères de type psychologique qui permettent d’affiner les catégories et de voir plus clair, dans leurs différences.

Le troisième chapitre, définit le cadre de la problématique générale, les méthodes et techniques utilisées.

La population étudiée est constituée avec des sujets arrivées en France exilés ou déportés en Amérique Latine et en Afrique ou aussi en situation de clandestinité. La population examinée comprend 40 réfugiés basques et ils ont entre 18 et 55 ans. La durée de l’exil varie entre 6 ans comme minimum, et 30 ans maximum. Il faut préciser que des 40 exilés, 29 travaillaient avant d’être exilés, 7 d’entre eux ont fait des études universitaires et 11 ont abandonné leurs études pour rentrer dans la clandestinité.

Les conditions de passation de l’enquête ont été les lieux où vivent ces personnes, par des RV dans un endroit convenable pour eux et les enquêtes ont été faites par le biais d’entretiens confidentiels.

En ce qui concerne les techniques de recueil des données, nous avons fait recours à l’observation participante et à l’entretien, pour décrire et comprendre quel est le sens que les sujets donnent à ce qui leur arrive à leur place d’acteur. L’entretien est caractérisé de face à face avec l’objectif de favoriser la production du discours des interviewés sur le thème défini par notre cadre de recherche.

Ils nous semble pertinent d’avoir aussi recours à l’entretien, pour inférer à partir de témoignages, les processus psychologiques et sociaux que les sujets exilés, mettent en œuvre pour faire face à ce qui leur arrive, dans des transitions entre un “avant” perdu et un “après” inconnu.

Les instruments qui ont servi à l’étude empirique, sont constitués d’un questionnaire d’adaptation pour adultes, d’une échelle de stress, d’un questionnaire de personnalité qui permet d’évaluer le contrôle, l’extraversion et le paranoïdisme. Enfin, nous avons choisi de recueillir des récits de vie qui concernent l’histoire familiale, et celle de l’engagement des individus dans le militantisme basque. Les sujets que nous avons choisi qui rapportent les récits de vie, ont vécu ou vivent encore l’exil. Les profils de ces sujets, sont représentatifs de trajectoires d’engagements différents. Ils correspondent aux 3 classes d’exil : l’exil comme réfugié commun, dans la déportation et dans la clandestinité. On considère que le récit de vie est un échange libre, où le sujet évoque son passé, se fait témoin à distance de lui-même de ses liens aux autres, de ses implications dans des contextes sociaux, politiques et culturels. L’entretien libre qui doit faciliter l’expression du sujet, à partir des questions que lui adresse l’intervieweur au retour sur soi différentes de celles qui prévalent, par exemple : dans l’introspection ou dans le monologue.

Le principaux résultats que nous avons retenus et analysés dans la thèse font l’objet du quatrième chapitre. Nous apporterons ici les résultats relatifs à l’adaptation, qui concerne les 40 sujets soumis à une batterie de 63 questions. Pour ce qui concerne l’adaptation personnelle, (20 questions) 67, 6% des sujets maintiennent une bonne adaptation personnelle et l’équilibre personnelle est positif et n’ont pas peur face à des situations imprévues. Par contre, 32,4% ont un problème de adaptation personnelle qui s’avère insuffisante, avec des sentiments d’infériorité liée à des sentiments de culpabilité sporadiques.

En ce qui concerne l’adaptation familiale, (10 questions) 64% des sujets ont une adaptation familiale équilibrée, ils n’ont pas de difficultés de cohabitation et acceptent facilement les normes établies. Mais pour 36% apparaissent des attitudes critiques au niveau de cohabitation et un manque d’acceptation des normes. Au niveau professionnel avec 18 questions, 56,1% disent maintenir un important esprit de camaraderie et de solidarité avec les collègues et ils assument avec responsabilité l’organisation du travail. Par contre 43,9% révèlent des attitudes de censure ou de rébellion face à l’organisation professionnelle. Finalement, sur l’adaptation au niveau social (15 questions) 57,1% des sujets sont ouverts, ils aiment être en relation avec les gens et ont des conduites positives. Mais pour 42,9% des sujets, apparaissent des conduites négatives, des désirs d’isolement et des attitudes d’insécurité.

Quant au résultats obtenues à l’échelle de stress, cette échelle est répartie selon 3 rubriques : au plan de relations humaines (15 questions) on observe que le stress affecte les évènements vécus au présent pour 54,3% des sujets. En revanche 45,7% indiquent quelques anomalies quant à la santé, avec des tachycardies et cauchemars entre autres. En rapport avec le style de vie,(12 questions) : 55,9% savent se dominer et se contrôler au cours de discussions, mais manifestent aussi de moments d’anxiété. Par contre 44,9% expriment de l’impulsivité.

Photo: Kenn Kiser
Photo: Kenn Kiser (kennkiser@yahoo.com).

Pour terminer avec l’échelle de stress, au niveau économique et du travail, (14 questions) 54,3% des sujets soulignent qu’ils souffrent de stress lorsqu’ils ont à exécuter un travail. Ici les caractéristiques du danger apparaissent quand ils ont à réaliser un travail qui comprend des éléments de menace. Mais, 45,7% montrent des caractéristiques moins stressantes au niveau du facteur de coordination.

Les résultats de l’échelle de stress social du travail, cette échelle contient 3 catégories de contextes : le travail en lui-même (13 questions) 52,9% souffrent de stress bien qu’ils montrent un caractère équilibrée et semblent constants, ils sont sensibles à l’apprentissage de connaissances nouvelles. D’autre part, 47,1% présentent comme conséquence du stress, des indices de non préoccupation et d’indifférence par moment.

Quant au contexte du milieu du travail, (14 questions) 50,1% déclarent un stress dérivé au moment de se montrer responsables de leurs tâches. Ici aussi, le concept de loyauté est un facteur stressant quand elle est liée à l’idéologie de ces sujets et les amène à agir avec le sentiment d’un devoir. Par contre, 49,9% souffrent de stress, quand ils se montrent plus combatifs et cela influe sur le dynamisme des conduites. Pour terminer avec cette échelle qui évalue la relation du sujet avec le travail (13 questions) 62,9% souffrent de stress en situations où il faut être compétitifs devant les autres. Par contre 38,1% souffrent de stress quand ils manifestent de l’optimisme dans le travail avec des risques de se tromper.

Quant au résultat du CEP, questionnaire de personnalité qui contient 3 échelles. On note que sur l’échelle de contrôle (14 questions) qui se réfèrent au thème de l’instabilité émotionnelle, 56,7% indiquent qu’ils pensent beaucoup à ce qu’ils vont faire avant d’agir, c’est à dire, qu’ils expriment des caractéristiques de sérieux et un état émotionnel assez équilibré. Par contre 43,5% indiquent qu’ils se sentent parfois déprimés sans l’exprimer directement, en le gardant pour eux-mêmes et qu’ils passent certaines périodes où ils se sentent très seuls.

L’échelle d’extraversion, (16 questions) pour mesurer l’extraversion sociale, dont les caractéristiques principales sont la facilité et le goût pour les contacts sociaux et les relations. 53,6% indiquent qu’ils sont à l’aise en public surtout parce qu’ils sont là incognito. Ils présentent des traits de simplicité et de responsabilité en tant qu’obligation morale ou intellectuelle impliquée dans le devoir et l’engagement. Par contre, 46,5% dénotent des indices de peur, quand quelqu’un murmure près d’eux. Quand ils prennent en charge quelque chose, ils préfèrent assumer leur responsabilité seuls, ce qui indique que le sens du partage est plus bas que chez les autres sujets et aussi que ces sujets ont besoin d’être , d’une certaine façon, actif et reconnu dans l’environnement social où ils vivent. Finalement, l’échelle de paranoidisme (13 questions) sur l’agressivité, la suspicion et la ténacité, présente aussi le cadre clinique de la paranoia. Dans cette échelle 51,6% indiquent qu’ils ne répondent pas avec dureté quand quelqu’un les attaque. C’est à dire, qu’ils sont permissifs et qu’ils font passer le dialogue et le raisonnement avant tout, dans les discussions. Ils aiment choisir des activités qui leur demandent de l’énergie et une rapidité action. Par contre, 48,8% indiquent qu’ils ne peuvent pas dormir quand ils ont des préoccupations, la discipline ne leur plait pas, et ils aiment davantage la solitude qu’ils acceptent en tant que norme pour eux.

Ensuite nous avons présenté dans la thèse des récits de vie de personnes qui se différencient par l’âge, le sexe, et la situation socioprofessionnelle… Elles ont eu une expérience de l’exil plus ou moins longue, et communément douloureuse pour elles. Ces récits ont été rapportés dans la thèse tels qu’ils ont été recueillis. Dans leur prolongement, nous leur avons associé des commentaires, et des résumés mais aussi des éléments d’interprétations centrées sur les situations et les périodes que nos sujets ont considéré comme saillantes dans leur parcours d’histoire personnelle. Ces situations et périodes sont des ruptures auxquelles ces sujets ont essayé de faire face. Ces situations et périodes, des transitions brusques ont eu pour conséquences ultimes l’exil, l’emprisonnement, des séparations de grande amplitude avec les milieux et groupes d’appartenance.

Photo: Anita Patterson
Photo: Anita Patterson (abpphotos@yahoo.com).

La réalisation au cours de l’étude de terrain des rencontres avec les personnes n’ont pas été sans difficultés souvent apparentes dans le contenu des entretiens retranscrits. Il s’agit des difficultés ordinaires, des entretiens et de toute enquête approfondie qui réclame de la part de l’interviewé une implication forte. Mais elles sont ici majorées par le contexte où les entretiens ont eu lieu et, bien sûr, par leur objet. De fait, ces entretiens peuvent réactualiser des traumatismes qui gênent l’expression " authentique " de soi et qui sont susceptibles d’entraîner des déformations involontaires ou non, des refoulements. Mais également, et à l’inverse –comme nous avons pu le constater sur " le terrain " –ces entretiens ont donné à nos sujets la possibilité de pouvoir évoquer, en confiance, des évènements graves et de les resituer. Attitude qui leur permet de mieux les comprendre, pour mieux se comprendre soi-même et, pourquoi pas, pour dépasser leur caractère dramatique.

Cette transmission à autrui d’éléments dramatiques du passé, est ainsi indissociable d’un travail psychique sur soi. Elle sous-tend en général, l’exercice des récits de vie et en justifie l’utilisation en psychologie, et pas seulement en psychologie clinique.

Ce travail psychique constitue une reconstruction par le sujet, sous le regard d’autrui, des liens entre des moments et des faits d’histoire personnelle. C’est aussi une mise en ordre qui ne se réalise pas totalement, par hasard… car il s’agit d’un effort du sujet pour donner, à ses actes passés et actuels des significations. Les personnes qui ont traversé de tels moments, ont pris des risques avec leur vie et celles des autres. Elles ont couru le risque de se tromper dans leurs choix, elles ont parfois, ignoré les raisons lointaines de leurs actes. Elles ont entre-temps changé, autrement dit, celui qui parle, qui se raconte aujourd’hui dans le cadre d’un entretien de recherche, n’est pas tout à fait le même que celui dont il parle. Mais il faut voir dans le récit, cet effort de signification et de reprise qui signe la singularité de ces actes dans les tensions ou les affrontements de la société.

Il importe de noter également que l’énonciation par le sujet et le contenu de son témoignage, ne sont pas indépendants de ses modes d’interactions avec “ l’écoutant ”. Ils ne sont pas indépendants de ce que le chercheur en attend et en fera, en fonction de ses propres cadres idéologiques, de la connaissance effective ou empathique qu’il a des problèmes ou même de ses préjugés.

Que peut-on tirer, pour notre recherche, des récits de vie, que nous avions souhaité plus nombreux qui concernent la clandestinité et l’exil de militants basques?.

A partir des discours des sujets, on retient que leurs engagements personnels même s’ils apparaissent subis ou accidentels, sont préparés de loin par les expériences de l’enfance et de l’adolescence. Par ces expériences ils ont été inscrits dans des contextes de socialisation, placés à l’épreuve d’injustices, de frustrations, ou de rejets…. Mais également dans ces contextes ils ont acquis des valeurs (liées à des modèles de personnes notamment de proches dans la famille, liées aussi, à l’identité et à la culture basque). La mise en pratique de ces valeurs leur a semblé pouvoir mettre fin aux sentiments de l’injustice, aux insatisfactions dues à la méconnaissance par les pouvoirs politiques des spécificités historiques, linguistiques, culturelles d’un peuple à forte identité. Ainsi les engagements porteurs de révolte et d’idéal, ont des racines profondes dans les histoires personnelles des sujets comme, à une autre échelle, dans l’histoire basque. Ces récits rendent-ils compte, souvent avec précision, des circonstances et des aléas qui ont déclenché dans une période particulière de la vie, le passage dans la clandestinité et l’exil. Ces circonstances, ces aléas n’ont suscité des actes que dans la mesure où ils correspondaient à des attentes et à des aspirations dont les sujets ressentaient, qu’elles ne pourraient pas se réaliser sans des transformations du système des institutions et sans leur engagement personnel dans ces transformations. Les changements qui s’ensuivent, dans leurs modes d’existence, de travail, de relation, même lorsqu’elles ne sont pas consenties, sont toujours à la base de souffrances. C’est le cas pour chacun des sujets, ces ruptures marquent l’échec vécu comme provisoire, d’un processus de reconnaissance identitaire. Il en est des conduites d’engagement militant, comme de toutes conduites humaines. Elles se situent dans des institutions politiques, économiques, culturelles, linguistiques… qui entretiennent entre elles des conflits, où certaines exercent des dominations sur les autres. Face à ces conflits et à ces dominations, aux insatisfactions qu’elles ont créées le sujet, se demande comment devenir " un opérateur d’histoire ". Comment définir de nouvelles institutions qui s’accordent à leurs attentes et à leurs aspirations et qui pourraient prendre en charge leurs revendications.

A travers les récits des sujets, on peut saisir comment ces déterminations interviennent dans l’orientation des conduites et dans la définition des images qu’ils ont formées d’eux-mêmes. On perçoit aussi, combien leurs activités sont pénétrées par des peurs et des angoisses, sont dépendantes de sentiments d’insécurité et de solitude sinon d’impuissance. Pour certains de nos sujets, les séquelles des traumatismes vécus apparaissent devoir être durables, et ils affectent leurs échanges avec leur entourage. Pour d’autres, au cours de la transition, la découverte de ressources personnelles et interpersonnelles apparaissent comme susceptibles de les atténuer, de maintenir une estime de soi positive, et développer des capacités d’adaptation active. L’ensemble des récits de vie confiés par nos sujets, témoignent des tentatives par lesquelles dans des conditions " défavorables " de leur socialisation, ils essayent de livrer un sens à leur existence et à celle de leur communauté d’appartenance. Sans nul doute, leurs références aux faits et aux luttes de l’histoire du peuple basque, à une idéologie groupale, mémorisée et transmise au fil des générations, participent-elles à la quête de ce sens. Ces références permettent aussi, de mieux réagir aux effets négatifs des événements transitionnels. Nous avons observé l’importance, notamment, des soutiens externes, familiaux, amicaux, associatifs, et professionnels. Également nous avons pu noter le rôle des expériences de relations “ qui comptent ” pour ces personnes, (comme les relations amoureuses ou de couples, ou relations de travail…). Expériences nouvelles quelquefois inattendues, elles ont aidé au développement de potentialités non soupçonnées, aux dépassements de soi que l’exil puis le retour (pour certains) entraînent. Ces expériences ne rompent pas toutefois avec des visées de changement social. Plus ou moins affirmées, nos sujets cherchent alors à rendre ces visées compatibles avec leur "nouvelle vie", ou ils tendent à les réinterpréter, à les évaluer, ou à les corriger selon leurs perspectives actuelles de socialisation.

Mon expérience, pendant la recherche auprès des ex-militants et militants de l’organisation, m’indique qu’ils représentent un “ensemble” de personnes présentant des difficultés, des carences et quelquefois des phobies diverses mais aussi, comme nous venons de l’indiquer, des moyens d’action pour faire face. Il peut être affirmé, pour ceux avec qui j’ai travaillé dans ce domaine, que la nécessité de trouver un sens à la vie est déterminante. Le militantisme et ses valeurs fournissent des orientations de vie autour desquelles, de nouvelles activités sont mises en œuvre. En outre, le sens établit et légitime l’identité sociale du sujet en tant que membre d’une Communauté et d’un Peuple. Certains de ces sujets ont étudié le basque et dénoncent la dispersion des prisonniers basques ou l’existence de la torture. De la sorte, la proximité à des personnes qui ont vécu des expériences de punition ou de répression, est une forte motivation pour militer dans l’organisation. On peut dire que les personnes que nous avons interrogées, forment un ensemble homogène, en regard de la recherche d’une identité, mais qu’elles sont différentes dans la façon, dont elles répondent à leurs situations d’exil.

Finalement, nous pourrions dire que l’expérience de la clandestinité et le retour de l’une ou de l’autre manière à la “normalité” ne sont qu’un cycle d’apprentissage, semblable à celui que suit toute personne, mais c’est un cycle d’apprentissage accéléré et à la fois discontinu, composé d’épreuves et de tensions extrêmes qui peuvent aller jusqu’à la mort.

Ce que nous avons voulu montrer dans cette thèse, c’est aussi comment ces personnes lorsque l’exil les contraignent, puisent des ressources pour construire ou reconstruire, ou maintenir vivants des liens sociaux, avec autrui, avec leurs collectifs d’appartenance et de référence, et élaborer également de nouveaux projets.

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