Une vocation collective pour la société basque

Javier RETEGUI AYASTUI, Président d’ Eusko Ikaskuntza/Société d’ Études Basques
Traducteur: Nelly PÉREZ DE SAN ROMÁN
Itzulpena euskaraz
Versión original en español
English translation

Nous nous trouvons au seuil d’une nouvelle ère. Les formes de vie et la culture qui ont défini le monde contemporain se transforment avec l’apparition d’autres qui surgissent progressivement sous nos yeux. « Le passé et le futur ne cessent de s’interroger et de se répondre mutuellement, au-delà du présent », affirmait l’historien européiste Gonzague de Reynold. Une société maîtrise son devenir dans la mesure où, consciente de sa nature et de son errance à travers le temps, elle est prête à contrôler sa propre évolution.

Nous sommes protagonistes d’un temps de profonds bouleversements structurels, mais d’énormes paradoxes également. D’une part, nous assistons à une généralisation sans précédent du savoir et de la connaissance ; d’autre part, le fossé du développement économique et culturel entre les régions riches et pauvres ne cesse de croître. Les marchés se mondialisent, mais la libre circulation des capitaux et de la richesse sèment l’incertitude face aux nouveaux pouvoirs qui émergent libres de contrôle social et sans tradition territoriale. L’économie industrielle, dominante durant deux siècles, s’affaiblit face à la post-industrielle, reposant sur la science et les technologies. Le modèle de progrès, basé sur la consommation massive des ressources naturelles, s’avère insoutenable et exige un changement de paradigme que nous ne sommes pas encore en mesure d’affronter. L’État-Nation perd de son influence au bénéfice d’entités supra-étatiques et sous-étatiques, mais les égoïsmes nationaux, ainsi que les intégrismes religieux, menacent à nouveau la paix, comme bien souvent dans le passé. Le corps social s’enrichit avec l’incorporation active de la femme et les importants progrès en matière d’égalité ; mais, cependant, le vieillissement accéléré des sociétés prospères augmente l’instabilité démographique.

Des mutations qui ébranlent les structures sur lesquelles a reposé séculairement notre architecture sociale. Et il nous faut assumer, dans un esprit ouvert et constructif, que nous nous trouvons face aux prolégomènes d’une nouvelle ère qui, en tant que telle, rendra obsolètes et stériles bien des clichés, qui ont fonctionné jusqu’à présent dans le domaine culturel, idéologique, économique et social. Il n’y a pas de réponse toute faite qui vaille : il nous faut innover et concevoir des modèles s’anticipant aux besoins présents et futurs ; il nous faut faire preuve d’une attitude intellectuelle capable d’affronter une « période constituante ».

Pour la société basque, ce monde de transition implique de nombreux défis, mais il offre également des opportunité inédites. L’apparition de nouveaux espaces qui débordent du moule traditionnel des États est une invitation à configurer une Euskal Herria-Vasconie géographiquement ouverte et culturellement adaptée à sa nature actuelle, caractérisée par sa pluriterritorialité et par les modes complexes d’adhésion de ses habitants. Le nouveau panorama démographique et migratoire nous pousse à créer des cadres flexibles d’intégration, afin d’éviter la création de populations culturellement exclues et socialement marginalisées. L’approfondissement culturel et la récupération de l’euskara, comme langue structurante, sont les clés pour intégrer toutes les personnes engagées dans un projet de convivialité et d’appartenance. Un basquisme intégrateur devrait incorporer les sentiments pluriels des habitants des différents territoires d’Euskal Herria, en favorisant la coexistence d’identités multiples.

Cette même logique de changements doit nous encourager à imaginer des espaces de collaboration dans le domaine économique et de développement social, au-delà des frontières traditionnelles. Nul doute, dans ce sens, que la Vasconie compte sur de solides bases pour devenir le noyau d’une région internationale géographiquement plus ample. L’Eurorégion Atlantique représente un objectif réel et possible, à condition d’être capables de faire évoluer la dimension de notre tissu productif et de le consolider en cohérence avec les forces politiques et sociales.

Mais nous devons non seulement aspirer à devenir une communauté culturelle et économique ; nous devons nous projeter à travers nos valeurs. Et c’est là le troisième aspect qui me semble essentiel pour la construction de notre avenir. Je considère que le basque, par tradition historique, est un peuple à grande sensibilité solidaire, à densité qualitative, qu’il convient de mettre en relief. Face à la perception utilitariste de l’être humain comme levier d’ambition et de convoitise, nous devons défendre le réarmement éthique, qui considère que la personne est la « mesure de toute chose », selon la vision classique.

Ce même élan doit atteindre le milieu naturel, dont nous sommes les maîtres et non pas de simples usufruitiers. Au cours des prochaines décennies, l’Humanité va devoir démontrer qu’elle est une espèce durable. Un enjeu colossal qu’il convient de commencer à relever dès à présent. Eusko Ikaskuntza-Société d’Études Basques a mis en œuvre en 2003 le Projet Spécial Pluridisciplinaire de Développement Durable, auquel ont participé plus de 300 personnes du monde économique, social, entrepreneurial et universitaire et qui s’est traduit par un plan d’actions claires et concrètes, visant à assurer le progrès rationnel et équilibré de notre pays.

Nous pensons que cette expérience profitable peut être appliquée aux domaines de réflexion qui nous concernent directement, dont trois tout spécialement : Compétitivité régionale, Nouvel Ordre mondial, démographie et citoyenneté ; Approfondissement et extension culturelle.

Dès son origine, Eusko Ikaskuntza s’est fixé pour mission d’encourager la formation d’une « vocation collective » au sein des communautés basques, en s’engageant à rassembler les volontés en faveur du surpassement et du progrès général. Aujourd’hui, plus que jamais, nous avons le devoir de nous impliquer activement pour relever les enjeux que doit affronter la société basque, en contribuant, dans la mesure de nos possibilités, à trouver les reformulations précises permettant à Euskal Herria-Vasconie de se situer à l’avant-garde du XXIe siècle. C’est dans ce sens que les plus de trois mille membres de cette institution, quasi centenaire, avons l’intention de travailler pour que la société civile basque puisse prendre les rennes de son avenir.

Texte complet du rapport « Eusko Ikaskuntza: Bokazio kolektiboa/Vocación colectiva »

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