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Le modèle de développement occidental est désormais le seul en fonctionnement au niveau du monde. La financiarisation, c’est-à-dire la recherche systématique à tous les niveaux des bénéfices les plus importants possibles dans le terme le plus court possible en est la règle. En même temps, la mondialisation, généralise progressivement ces logiques de fonctionnement à l’ensemble de la planète. Les pays émergents ont emboîté le pas de leurs aînés pour s’inscrire eux-aussi dans ce modèle du «toujours plus» à court terme. Ils sont aujourd’hui, sur bon nombre de domaines d’activité capables de faire «mieux» et «plus» que leurs prédécesseurs. Les caractéristiques fondamentales du système, caractéristiques mises à cru par la généralisation du crédo néolibéral (au service du pouvoir des puissants) abhorrant toute intervention régulatrice sur le libre marché, génèrent des inégalités très importantes et de plus en plus profondes, tant entre les régions du monde (même si certains pays émergents sont en train de réduire un peu ces différences pour ce qui les concerne) qu’à l’intérieur des espaces considérés comme riches. Dans ces derniers, en effet, des poches de pauvreté, parfois extrêmes, se développent de plus en plus...
L’ensemble de ces inégalités et la pauvreté s’affrontent à l’insolence de la richesse et génèrent des conflits durs (de divers types, de la piraterie à la violence urbaine en passant par les différentes formes de trafic ou de «nettoyage» urbain ou ethnique) qui marquent si fortement la période actuelle. Les pauvres aspirent évidemment à vivre mieux (quitte à faire n’importe quoi pour cela), les riches (et même souvent les moins riches, dès qu’ils considèrent qu’ils ont quelque chose à perdre) veulent protéger leur richesse. Le conflit est là, substantiel, fondamental. Les inégalités existantes deviennent insoutenables et réduisent progressivement les possibilités de sortir de ces problèmes par la coopération sociale, la solidarité et le consensus sur des valeurs fondamentales qui feraient que l’on devrait pouvoir vivre ensemble dans la même société. Même s’il est souvent mené à bien sous l’impulsion d’institutions politiques et économiques et de personnalités respectables (ou au moins vendant bien l’image de leur respectabilité), ce développement est fondamentalement «sauvage» à bien des égards... Sa «morsure» sur l’environnement social, sociétal et naturel est désormais devenue insupportable!
Globalement, ces nouvelles dynamiques génèrent au gré de leur développement des modalités en expansion et en accélération permanente. De plus en plus de domaines de la vie sociale se «marchandisent», de plus en plus de zones géographiques sont aspirées par cette expansion, les cycles de vie des différentes dimensions de l’économie et de la société s’accélèrent de plus en plus... Et dans la foulée, en quelque sorte comme résultante intégrée de tous les autres, le cycle des crises, désormais systémiques et mondiales, s’accélère lui aussi et annonce des crises de plus en plus fréquentes et de plus en plus profondes, qui marque par des cracks et ruptures et par l’extension de la misère et des difficultés qui s’ensuivent, les changements dans le ranking mondial, pour les technologies, les secteurs, les entreprises, les catégories sociales, les pays et continents...
Ce n’est pas pour autant qu’il faut attendre une hypothétique régulation mondiale. Il est fort à craindre qu’elle ne vienne que bien tard et que de toutes façons, compte tenu de la configuration politique du monde, elle ne soit pas en mesure de s’attaquer à la racine des questions posées! Il faut «penser global et agir local». il faut prendre des initiatives citoyennes, entreprendre (au sens large) à tous les niveaux (du niveau individuel à divers niveaux collectifs) auxquels une once de pouvoir, pourvu que celles ou ceux qui l’exercent soient lucides, permet de prendre des initiatives et de faire quelque chose allant dans le bon sens. Trois grandes classes de valeurs doivent être étroitement «tricotées» ensemble: l’initiative, la solidarité et la soutenabilité. L’une est toujours boiteuse sans les deux autres.
Il faut réinventer les dynamiques du monde. C’est en partant du niveau de fonctionnement de chacun, de son niveau de «granularité» de pouvoir que l’on peut enclencher les processus de changement... Les théories actuelles des dynamiques sociales (complexité, émergence, institution, structuration, expérimentation sociale...) nous invitent à penser ces dynamiques en bottom-up au moins autant qu’en top-down, à considérer les chocs et les impacts mutuels de ces deux logiques, à considérer aussi que les initiatives innovantes et solidaires doivent être prises et mises en œuvre de façon concrète à quelque niveau que ce soit. Penser comme un intellectuel qui décrit le monde, qui croît le comprendre et qui dit depuis sa tour d’ivoire ce qu’il faudrait faire est insuffisant et dangereux. Pour bien penser et bien agir, il faut agir et penser en «dialogie», donc le faire en boucles serrées, en liaison étroite et permanente, entre les chercheurs, les praticiens et les personnes concernées. C’est finalement le sens épistémologique et téléologique le plus profond de la «transdisciplinarité» proposée par Edgar Morin.
Pour changer, il faut innover. Devant l’ampleur et l’urgence des problèmes qui se posent à l’humanité, l’innovation doit être partout: innovation technologique, certes, mais aussi, innovation organisationnelle, innovation sociale, innovation sociétale... Innover sous l’angle de ce que l’on fait: de nouveaux produits, de nouvelles technologies, de nouveaux modes de participation (dans la démocratie politique, dans la société, dans les entreprises, dans les associations...), de nouvelles formes de relations aux artéfacts et à la nature, de nouvelles formes d’aménagement du territoire, de nouvelles relations entre les hommes et les femmes, entre les régions du monde... Mais aussi innover en mettant en œuvre de nouvelles façons de faire les choses, de nouvelles façons de s’impliquer, de se mettre en projet collectif, de se mettre à distance critique, de développer des formes coopératives et mutualistes... Attention à l’illusion technologique, à la suffisance «intellectualiste», aux modalités technocratiques et aux démarches technology-driven ou science-driven... Attention à l’ensemble de ces dangers, sous toutes leurs formes et à tous les niveaux, y compris là où on ne les attend pas, notamment dans les plis de sa propre pensée.
Le monde doit innover, en mettant en œuvre «chemin faisant» ces innovations, en «tricotant» systématiquement de façon serrée initiative, solidarité et soutenabilité d’une part, réflexion et action d’autre part, sous peine de s’enferrer définitivement dans le chaos et la barbarie. Le regard consacré à l’innovation à l’innovation responsable dans le cadre du congrès d’Eusko ikaskuntza a pour ambition d’ouvrir et d’alimenter ces réflexions.
Opinion des lecteurs:
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